La vie d’Edgar Allan Poe

Edgar Allan Poe est un auteur américain de la première moitié du XIXe siècle, très prolifique puisqu’il a écrit plus d’une soixantaine de nouvelles et de poèmes. Edgar Allan Poe s’affirme en tant qu’écrivain de grande renommée, reconnu prestigieux en France grâce au poète Charles Baudelaire qui, en traduisant ses œuvres, leur a conféré une beauté et une pureté exceptionnelles.

Malmené dès l’enfance par la vie, assoiffé de tendresse, malchanceux en amour, hanté par ses phantasmes et ses démons intérieurs, névrosé au plus haut point, la littérature lui sert de catharsis et lui permet d’exorciser ses dieux noirs.

Incompris de ses congénères romanciers de langue anglaise, mais sincèrement loué et admiré par des poètes tels que Tennyson, Yeats et Mallarmé, écartelé entre névrose et lucidité, Poe refuse d’accepter ses défaites et prend souvent le parti de rire de ses misères plutôt que d’en pleurer.

Ses œuvres sont autant de cris de souffrance, dans un monde qu’il ressent comme hostile, peuplé de silence et d’infinie solitude. Son humour est l’expression de ce désespoir courageusement camouflé, de ce défi du vaincu à l’égard d’un destin qui l’accable.

Analyste lucide raisonnable, capable de démonter n’importe quel mécanisme, Edgar Poe est à l’origine du roman policier en littérature. Les Histoires Extraordinaires, les Nouvelles Histoires Extraordinaires et les Histoires Grotesques et Sérieuses sont dominées par le plus instinctif des sentiments, la peur.

L’univers des contes d’Edgar Poe est un monde de cauchemar, peuplé de paysages nocturnes désertiques et silencieux, ponctués de demeures lugubres et mystérieuses, où vivent des personnages déséquilibrés, à l’hérédité chargée, s’adonnant parfois à l’alcool et à l’opium, se sentant traqués et menacés au point d’en perdre la raison ou la vie dans des circonstances horribles.

Si la vie ne fait pas l’œuvre d’un écrivain, du moins entre-t-elle ici largement dans celle d’Edgar Allan Poe, au point qu’il nous a semblé indispensable de relater sa biographie qui éclaire le lecteur dans une saisie intelligente de son œuvre.

Enfance et jeunesse

Les premières années

Edgar Allan Poe naît le 19 janvier 1809 à Boston, enfant de David Poe Jr. et Eliza Hopkins, tous deux comédiens de théâtre. La vie d’Edgar prend un tournant tragique avec la disparition précoce de son père, suivie de près par le décès de sa mère en 1811, laissant le jeune Edgar orphelin à l’âge de deux ans. Recueilli par le couple Allan de Richmond, Virginie, il adopte le nom d’Edgar Allan Poe. Cette adoption marque le début d’une relation complexe et tumultueuse avec son père adoptif, John Allan, un riche négociant en tabac.

Éducation en Angleterre

En 1815, la famille Allan déménage en Grande-Bretagne, où Edgar poursuit sa scolarité. Il fréquente d’abord une école en Écosse, puis l’école des demoiselles Dubourg et la Manor House School à Stoke Newington. Cette période européenne forge chez le jeune Edgar un solide bagage culturel et intellectuel, tout en semant les premières graines de son imaginaire gothique.

Université et premiers écrits

L’université de Virginie

En 1826, Poe entre à l’Université de Virginie, où il excelle en langues mais accumule également des dettes de jeu, source de conflits avec John Allan. Sa situation financière précaire et les tensions avec son père adoptif l’obligent à quitter l’université après seulement un an.

En décembre, John Allan le retire de l’Université pour l’employer dans sa maison de commerce. Poe refuse de se plier à ses exigences et se rend en avril à Boston pour s’engager dans l’armée américaine sous le nom d’Edgar A. Perry.

Premières publications

Déterminé à devenir écrivain, Poe publie son premier recueil, “Tamerlan et autres poèmes” en 1827. C’est un échec commercial, mais ce pas marque le début de sa carrière littéraire. Après un bref passage dans l’armée, il retourne à la vie civile et publie un second recueil en 1829, influencé par la mort de Frances Allan, sa mère adoptive.

Carrière littéraire

Début et mariage

Les années suivantes sont marquées par la publication de diverses œuvres et par des emplois dans le secteur de l’édition, où Poe se distingue par sa critique littéraire acerbe et ses contes fantastiques. En 1836, il épouse Virginia Clemm, sa cousine âgée de treize ans, avec qui il entretient une relation complexe et profondément affective.

Succès et difficultés

Edgar Poe connaît le succès avec la publication de “Le Corbeau” en 1845, mais sa vie est assombrie par la maladie de Virginia et par ses propres problèmes d’alcoolisme. Malgré une reconnaissance critique, il peine à trouver la stabilité financière, oscillant entre les périodes d’abondance créative et les crises personnelles.

La mort de Virginia en 1847 plonge Poe dans un désespoir profond, influençant ses écrits ultérieurs marqués par des thèmes de mort et de perte. Il continue d’écrire et de publier, explorant des genres variés, de la critique à la poésie, en passant par le conte fantastique.

Une mort mystérieuse et inexpliquée

En octobre 1849, Edgar Allan Poe est retrouvé inconscient dans les rues de Baltimore et meurt quelques jours plus tard, le 7 octobre, dans des circonstances jamais élucidées. Sa mort prématurée, à l’âge de 40 ans, ajoute à la légende d’un écrivain tourmenté, dont l’œuvre continue de fasciner.

Le 3 octobre 1849 était un jour d’élection à Baltimore. Le soir même, un certain Joseph Walker se dirigeait en direction du pub le Gunner’s Hall. C’est alors qu’il trouve dans le caniveau un homme mal fagoté et complètement délirant. C’est Edgar Allan Poe. L’écrivain, d’ordinaire toujours tiré à quatre épingles, porte des vêtements beaucoup trop grands pour lui. Il est à moitié inconscient et délire. Edgar Allan Poe est alors conduit à l’hôpital.

Le 27 septembre 1849, l’auteur avait quitté Richmond pour se rendre à Philadelphie, où il devait accomplir un travail d’édition. Mais depuis ce jour, personne n’avait de nouvelles d’Edgar Allan Poe. Personne ne l’a vu avant le 3 octobre 1849. Pris de crises de délire durant son séjour à l’hôpital entre le 3 octobre et le 7 octobre, l’auteur est incapable d’expliquer sa présence à Baltimore. Il mourra le 7 octobre 1849, officiellement d’une congestion cérébrale liée à l’alcool et la drogue.

Alcool, drogue, suicide ?

Bien qu’Edgar Allan Poe soit connu pour avoir un fort penchant pour l’alcool et la drogue, les faits qui entourent sa mort sont plus que troublants. Toutes sortes de théories ont donc fini par voir le jour. L’une des premières, émise par Baudelaire lui-même, est l’hypothèse du suicide. Pourtant, cette théorie a été réfutée.

En effet, des psychologues ont fait analyser de nombreux écrits de l’auteur, ainsi que toute sa correspondance personnelle, par une intelligence artificielle. La conclusion fut qu’Edgar Allan Poe a été sujet à « plusieurs épisodes dépressifs potentiels », mais que rien n’indique avec certitude qu’il se soit suicidé. Comme le souligne l’étude parue le 24 février 2020 dans la revue Journal of Affective Disorders : « Des modèles significatifs et cohérents de dépression n’ont pas été trouvés et ne soutiennent pas le suicide comme cause de décès. »

L’une des autres théories les plus admises concernant la mort d’Egard Allan Poe est l’alcool. En effet, l’auteur a eu plusieurs épisodes d’addiction au cours de sa vie, avant d’arrêter de boire. Mais le décès de sa femme en 1847 l’aurait fait rechuter. En effet, pour certains, l’état d’errance et de délire de l’auteur retrouvé dans les rues de Baltimore ne fait aucun doute : Edgar Allan Poe a été victime d’une crise de delirium tremens. Toutefois, le médecin traitant de l’auteur, John Moran, a réfuté cette hypothèse. Par ailleurs, des études faites sur les cheveux de l’auteur démentent aussi cette possibilité.

Violence, corruption, meurtre ?

D’autres théories entourent la mort d’Edgar Allan Poe, dont celle du meurtre. Dans Midnight Dreary : The Mysterious Death of Edgar Allan Poe, John Walsh avance l’hypothèse du meurtre de cette façon : les frères de Sarah Elmira Shelton, alors fiancée à Edgar Allan Poe, auraient menacé l’auteur. Se basant sur des journaux, lettres et autres documents, Walsh soutient que, malgré la mise en garde des trois frères, l’écrivain serait retourné à Richmond dans le but d’épouser Sarah Shelton. Seulement, les trois frères l’auraient attrapé à Baltimore, frappé, forcé à boire et laissé pour mort.

Une autre théorie explique qu’Edgar Allan Poe aurait tout simplement été victime de cooping, une fraude électorale qui consistait à forcer une personne, même sous la contrainte, à voter une ou même plusieurs fois pour un candidat. Les victimes de copping étaient kidnappées, souvent droguées ou forcées à boire, et déguisées autant de fois qu’il fallait de votes. Cette hypothèse reste une des plus populaires concernant la mort d’Edgar Allan Poe. En effet, l’auteur a été retrouvé un jour d’élection à proximité du Gunner’s Hall, un lieu connu pour ce genre de pratique.

Une maladie : rage, tumeur au cerveau ?

En 1995, une autre hypothèse sur la mort d’Edgar Allan Poe est avancée. Ce dernier aurait souffert de la rage. Effectivement, selon le docteur Michael Benitez, médecin cardiologue de l’université du Maryland, Edgar Allan Poe présentait tous les symptômes de la rage : les tremblements, les délires et une forte fièvre. Edgar Allan Poe souffrait aussi de « variations inhabituelles du pouls, de la respiration et de la température, ainsi qu’un refus phobique de boire de l’eau », qui sont des symptômes de la rage apparaissant en phase terminale de la maladie.

Une théorie plus récente affirme qu’Edgar Allan Poe avait une tumeur au cerveau. Ce qui aurait expliqué les derniers agissements et la confusion de l’auteur. Lors de l’exhumation du corps du poète, soit trois décennies après sa mort, le cercueil de l’auteur s’est brisé. Un ouvrier a alors remarqué une masse qui se trouvait à l’intérieur du crâne. Cela ne pouvait pas être le cerveau de l’auteur, cet organe étant un des premiers à se décomposer. Toutefois, les tumeurs cérébrales se calcifient et restent dans le crâne du défunt. Cette théorie n’a été ni réfutée, ni confirmée.

Plus de 180 ans après la mort d’Edgar Allan Poe, elle reste toujours un mystère.

Postérité

La reconnaissance posthume de Poe est largement due à Charles Baudelaire, qui traduit son œuvre en français, contribuant à sa célébrité en Europe. Aujourd’hui, Edgar Allan Poe est considéré comme un maître du fantastique et du macabre, un précurseur du roman policier, et l’un des premiers théoriciens de la nouvelle moderne. Son influence est indéniable dans la littérature mondiale, où il continue d’inspirer écrivains et créateurs à travers les genres et les générations.

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